10 choses à savoir sur le "peintre populaire" Chéri Samba

Publié le 22 Feb 2024

Rares sont les artistes contemporains à marquer l’Histoire aussi fortement que Chéri Samba. Figure de proue des artistes afro, il a ouvert la voie de la reconnaissance internationale à des générations d’artistes africains. 

 

Peintre ambassadeur de la “peinture populaire”, Chéri Samba s’est forgé son propre univers, influencé par la bande-dessiné et la publicité, où s’entremêlent textes et images, critiques acerbes et humour piquant, thématiques épineuses et couleurs joyeuses. 

 

Profondément ancrée dans son temps, l'œuvre de Chéri Samba est figurative, narrative, politique, caricaturale, mais aussi universelle. Découvrez cet artiste congolais à travers 10 choses à savoir sur Chéri Samba !

1. Il aurait dû être forgeron 

 

Chéri Samba, de son vrai nom Samba wa Mbimba N'zingo Nuni Masi Ndo Mbasi, était prédestiné à une carrière de forgeron, sur les pas de son père. Mais le destin en a décidé autrement, et il s’est forgé une carrière d’artiste dès son plus jeune âge, alors qu’à seulement 8 ans, il esquissait sur le sable. A l’école, il copie les bandes dessinées humoristiques de la revue Jeunes pour Jeunes et les vend à ses camarades pour aider sa famille. Constatant le succès de ses œuvres, il quitte en 1972 l’école et son Kinto M'Vuila natal pour vivre à Kinshasa, la capitale du Congo. 

 

2. Il a été peintre d’enseignes publicitaires

 

Arrivé à Kinshasa à l’âge de 16 ans, Chéri Samba cherche du travail dans les ateliers des peintres d'enseignes et de publicité de l'avenue Kasa Vubu. La recherche d’emploi est difficile et lui inspire le tableau L’espoir fait vivre (1989). Il trouve finalement un emploi chez Mbuta-Masunda grâce à son inventivité. Dans ce haut-lieu culturel tourné vers la bande-dessiné, il s’imprègne des codes qui vont marquer son travail.

Chéri Samba, L’Espoir fait vivre, 1988

3. C’est un as de l’autopromotion 

 

Chéri Samba, ce n’est pas qu’un artiste visuel, mais un artiste total : “Ma vie et mon œuvre sont tout un ensemble. Il y avait une joyeuse compétition entre les artistes et pour me différencier, j’ai créé la « griffe sambaïenne ». J’avais mon look, mes publicités, mes banderoles devant l’atelier, mes lettres à en-tête et cartes de visite avec photo, mon cachet Chéri Samba… Je voulais faire une communication maximale. On n’est jamais mieux servi que par soi même !”. C’est en ces mots qu’il revient sur la première grande étape de sa carrière, l’ouverture en 1975 de son propre atelier et boutique d’art, dans la zone Ngiri-Ngiri. Il se fait alors un nom à l’échelle locale en tant qu’illustrateur, en travaillant pour Bilenge Info, un journal de divertissement, et pour les revues BD zaïroises. 

 

4. Chéri Samba est un grand adepte des autoportraits

 

Chéri Samba réalise son premier autoportrait en 1975, un sujet qui ne le quittera plus. A partir de 1985, il est un sujet récurrent de ses propres toiles : “Puisque c’est moi qui peint, ce sont mes idées, je décide du sujet, je décide des commentaires… pourquoi donc mettre le visage de quelqu’un d’autre plutôt que le mien ?”. Non sans humour, il affirme également : “Au passage, je n’hésite pas à m’améliorer, à me rajeunir. Par contre, quand il s’agit de reproduire le visage des autres, je me donne beaucoup de peine pour être le plus fidèle possible à la réalité, j’agis avec intelligence et subtilité.” (Le Journal du Dimanche)
Pinceau entre les dents, poisson-sirène, aux côtés de Picasso, toiles sous les bras… Ses propres mises en scène sont aussi surréalistes que métaphoriques

 

5. Il capte l’attention de son public avec du texte

 

Afin d’attirer l’attention de son public, Chéri Samba prend la décision d’intégrer du texte dans ses tableaux. Slogan, commentaire… Il incite ainsi les spectateurs.rices à passer davantage de temps devant ses œuvres bavardes afin de mieux la comprendre, et rend hommage à ses influences premières, la BD et la publicité. C’est la “griffe sambaïenne”, et ça marche ! La foule dévisage ses toiles et s’arrête pour les décrypter. Ses textes, en français, anglais ou lingala, permettent notamment d’exposer son point de vue engagé sur les sujets abordés.

Chéri Samba, Le secret d'un petit poisson devenu grand, 2007

6. Chéri Samba est un artiste afro engagé 

 

L’art de Chéri Samba ne lésine pas sur l’engagement. L’artiste congolais aborde sans réserve des thématiques sociales et politiques épineuses, de la plus locale à la plus universelle : la sexualité, la place des femmes, la corruption, les inégalités sociales, le sida, les enfants-soldats, la crise écologique, le racisme… Au travers de scènes de la vie quotidienne ou de l’actualité, il traduit sa vision du monde qui l’entoure, critique et perspicace, parfois avec un grand sens de la dérision. A la fois observateur et militant, il fait passer ses messages à la manière d’un journaliste plasticien. En effet, Chéri Samba se revendique lui-même comme journaliste de terrain obsédé par la quête de vérité. Mais l’artiste ne représente pas que les faces sombres de l’humanité. Il peint aussi l’effervescence haute en couleur de Kinshasa, la sape, la danse et la fête. 

 

"Ce sont les artistes qui font le monde. Un monde sans artistes est impensable.
On dit que les artistes sont des petits dieux. Les dirigeants doivent nous écouter parce que nous sommes les porte parole du peuple."
Chéri Samba



7. Il a connu le succès grâce à une exposition à Paris 

 

L’exposition Magiciens de la terre, qui a lieu au Centre Pompidou et à la Grande halle de la Villette, lui apporte le succès international attendu. Aux côtés d’autres artistes africains, il est repéré par des collectionneurs du monde entier, dont Jean Pigozzi. Il reçoit ses premières commandes étrangères et entre dans la maturité de sa carrière. 

 

8. Il a participé à la Biennale de Venise 

 

En 2007, Chéri Samba est invité à participer à la 52e exposition d'art internationale à la Biennale de Venise, intitulée « Think with the Senses—Feel with the Mind. Art in the Present Tense ». Une consécration pour cet artiste africain qui rêvait d’une célébrité permettant de mettre en lumière l’art afro. 

Chéri Samba, Le petit Kadogo, 2008

9. C’est un ambassadeur de l’art africain 

 

Avant Chéri Samba, les grands noms de l’art contemporain africain n’existaient pas vraiment. Dans l’ombre, voire déconsidérés, ils ne jouissaient que d’une faible reconnaissance en Occident. C’était sans compter sur Chéri Samba, qui est parvenu à crever le plafond de verre et à devenir une référence, un porte-parole, et un véritable ambassadeur de l’art africain. Il a ouvert la voie à une renaissance de l’art afro en plein boom encore aujourd’hui.



10. Une grande rétrospective lui est réservée au Musée Maillol  

 

Du 17 octobre 2023 au 7 avril 2024, le Musée Maillol à Paris dédie une première grande rétrospective au travail de Chéri Samba. L’exposition retrace 40 ans de création à travers une soixantaine de tableaux. A ne pas rater !


« C’est bien qu’on n’ait pas attendu que je sois mort pour monter cette rétrospective, je rends gloire aux organisateurs ! (...) J’ai l’impression que ma vie défile devant mes yeux. On ne se rend pas compte que les années passent, hein ? Car, même si on se voit vieillir dans le miroir, si les cheveux blanchissent, on a toujours le souvenir de soi bébé ! »
Chéri Samba

Chéri Samba, J'aime la couleur, 2003

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