Art Basel Miami Beach : nos 5 œuvres coups de cœur à l'incontournable foire d’art contemporain américaine

Publié le 12 Dec 2023

Du 8 au 10 décembre 2023, Art Basel Miami est revenue pour une 21ème édition au gigantesque Miami Convention Center de Miami Beach ! Avec ses 277 galeries originaires de 35 pays présentant des œuvres de plus de 4 000 artistes, la foire d’art contemporain majeure d’Amérique du Nord réunit la fine fleur de la création contemporaine et des galeries. Le rendez-vous incontournable des amateurs.rices et collectionneur.se.s d’art venus du monde entier pour l'occasion. 

 

Les coups de coeur Misancene à Art Basel Miami Beach 2023

 

La foire d’art contemporain Art Basel Miami Beach est divisée en plusieurs secteurs :
- Galeries : la section principale où découvrir les stands des galeries mondiales majeures, avec des oeuvres allant du 20ème siècle à aujourd'hui ;
- Nova : un secteur dédié à la nouveauté, où les galeries proposent des créations datant de ces trois dernières années uniquement ;
- Méridiens : un secteur novateur curaté par Magali Arriola pour découvrir des oeuvres d'art monumentales allant au-delà des limites traditionnelles des foires ;
- Kabinett : un secteur hybride où les galeries proposent des expositions thématiques, historiques ou solo ; 
- Positions : le secteur dédié aux jeunes galeries présentant une exposition solo d'artistes émergent.e.s ; 
- Enquête : un secteur dédié à des courants artistiques historiques.

 

Après une longue et enrichissante déambulation dans ce dédale d'oeuvres d'art, Misancene a sélectionné ses 5 coups de cœur !

Esaí Alfredo, La Ciudad Carmesí (2023), présenté par Spinello Projects 

Esaí Alfredo, La Ciudad Carmesí ou The Crimson City (2023), Oil on canvas 60 × 80 in | 152.4 × 203.2 cm

Jeune artiste de Puerto Rico né en 1997, Esaí Alfredo Figueroa Ruiz a commencé à peindre en copiant des scènes de film dans son enfance. Une influence cinématographique certaine que l’on retrouve encore dans ses toiles, aux côtés de sa nouvelle fétiche, Nightfall de Isaac Asimov, et de son vécu d’enfant queer. En 2015, il sort diplômé de l’école des Beaux Arts de Humacao. Il suit ensuite des cours de dessin à l’Atelier San Juan avant d’obtenir un second diplôme en 2020, aux Beaux Arts de Pennsylvanie

 

“Nocturnal World” est une série de peintures à l’huile dans lesquelles Esaí Alfredo explore le thème de la pollution lumineuse. Il interroge les conséquences sur l’humanité de l’invisibilité des étoiles dans le ciel. Le sujet de la déconnexion de l’humain au cosmos traverse ses toiles, construites comme des histoires fictionnelles. Représentant d’abord la transition d’un ciel rural étoilé à celui éteint des villes, il insémine ensuite une pincée de science-fiction par la présence d’une vision nocturne mystérieuse. Il nous interroge : comment savoir, aujourd’hui, si les lumières perçues dans le ciel sont celles d’un OVNI ou des constructions humaines ? 

 

La Ciudad Carmesí exposée à Art Basel Miami condense l’identité picturale de Esaí Alfredo. Dans un réalisme fantasmagorique, il représente un duo queer entrelacé - comme un cocon dans la froideur de la nuit - faisant face à une hallucination lumineuse : une route menant vers un horizon citadin dont la lueur rouge scinde le ciel d’une campagne étoilée aux teintes bleu-vert, un clin d’oeil subtil au Magicien d’Oz.

Louisa Gagliardi, Absorbed (2023), présentée par la Galerie Eva Presenhuber

Louisa Gagliardi, Absorbed (2023), Gel medium, ink on PVC 240 x 200 cm 94 1/2 x 78 3/4 inches

Née en 1989 à Sion, Louisa Gagliardi est une artiste suisse qui vit et travaille à Zurich. Diplômée de design graphique à l'école cantonale d'art de Lausanne (ECAL), la jeune femme de 34 ans a été repérée sur Instagram en 2015. Depuis lors, elle connaît une ascension fulgurante et multiplie les expositions d’envergure. 

 

Entre peinture et graphisme, les œuvres de Louisa Gagliardi sont des créations numériques imprimées sur toile en vinyle puis couvertes de gel. Parfois, elle y ajoute une touche au pinceau à l’aide d’une laque ou de vernis à ongles. De ce jeu entre virtuel et matière résulte une surface parfaitement lisse digne des panneaux publicitaires. Un médium qui fait écho aux sujets abordés par l’artiste, où l’humain semble désincarné, ailleurs, fantomatique. Dans des scènes à la fois banales et énigmatiques, elle joue avec la transparence, la dimensionnalité, pour mettre en lumière une angoisse existentielle. Elle travaille sur la question du paraître, du masque social, qu’elle applique aussi bien aux situations de la vie quotidienne qu’aux fastes du microcosme artistique qu’elle a pénétré. 

 

Exposée à Art Basel Miami, l'œuvre Absorbed illustre son univers pictural éthéré, à la fois familier et angoissant. Les couleurs douces du tableau, entre ciel et eau, n'évoquent pas un sentiment de plénitude. L’homme immergé, comme en apesanteur, est accoudé à un escalier vertigineux sur lequel est assise une femme. Rappelant le décor de Truman Show de Peter Weir, un film sur la facticité et les faux-semblants de la société moderne, l'œuvre de Louisa Gagliardi parvient à nous plonger dans une réalité d’une inquiétante étrangeté.

Bassim Al Shaker, Ablution and Absolution (2023), présenté par Rhona Hoffman Gallery

Bassim Al Shaker, Ablution and Absolution (2023), Oil on canvas, 60 x 48 inches

Le peintre Bassim Al Shaker est un artiste irakien réfugié aux Etats-Unis dont il est désormais citoyen. Il est né et a grandi à Bagdad, en Irak, durant une période de conflit politique. Il est diplômé des Beaux Arts de Bagdad. Très attaché à son héritage identitaire et marqué par la crise humanitaire qu’il a connue lors de l’invasion de l’Irak en 2003, Bassim Al Shaker a notamment été invité à représenter son pays lors de la Biennale de Venise en 2013. 

 

Dans sa série intitulée Four Minutes, il transcende son enseignement de peinture académique pour créer des toiles abstraites qui s’aventurent en un terrain rarement représenté en peinture. En effet, il peint le moment qui suit la détonation des bombes, lorsque les débris volent, que le ciel et l’air se fendent avant de laisser place à un silence assourdissant. Bassim Al Shaker affirme toutefois ne pas peindre la mort mais l’espoir, la résilience et la gratitude, celle d’être toujours en vie, malgré cette expérience traumatique. 

 

A travers sa riche palette et ses nombreux coups de pinceaux, une énergie explosive se dégage de toiles telle que Ablution and Absolution. L’ambiance atmosphérique, issue d’un autre espace-temps, rappelle un Jean-Honoré Fragonard ou un William Turner. On y devine de la fumée, des nuages, du feu. Une effervescence chaotique des éléments dans une palette dénuée d’agressivité, qui retranscrit en peinture le souvenir d’un sentiment indicible.

Bisa Butler, Highlife (2023), présenté par Jeffrey Deitch Gallery 

Bisa Butler, Highlife (2023), Vinyl, silk, cotton, sequins, designer woven fabric, velvet and faux fur Quilted and appliquéd 84” x 85”

L’artiste textile afro-américaine Bisa Butler est née à Orange dans le New Jersey. Elle est diplômée des Beaux Arts de l'université Howard. Douée d’un talent artistique dès son plus jeune âge, elle a affirmé son style durant ses études en utilisant le textile et le collage comme médium. Une révélation qui fait écho à son enfance, lorsque sa mère et sa grand-mère lui apprenaient à coudre. Une tradition familiale qu’elle remet au goût du jour dans ses courtepointes hautes en couleurs. 

 

Sur ces couvertures matelassées utilisées comme ornement, elle crée des portraits et représente la réalité africaine. Depuis sa rencontre avec les membres du collectif Africobra, Bisa Butler s’attache à documenter et corriger les informations transmises sur la communauté noire. Par son art, elle raconte sa version de l’histoire au grand public tout en prônant son héritage africain avec fierté

 

Après avoir réalisé un croquis détaillé, elle travaille le tissu (laine, coton, mousseline…) dont les couleurs éclatantes et les motifs riches (tel que le batik traditionnel) sont assemblés pour former des portraits de personnes noires. Les pièces de tissus sont ses touches de peinture, qu’elle coud sur une machine industrielle. Dans Highlife, elle rend notamment hommage à la culture de la Sape, originaire du Congo, qui a érigé l’habillement au rang d’art sacré. Entre tradition et art contemporain, les créations de Bisa Butler contribuent à la revalorisation de l’histoire et de la création afro-américaine. 

Ai Wei Wei, Washington Crossing the Delaware (2023), présenté par Neugerriemschneider Gallery 

Ai Wei Wei, Washington Crossing the Delaware (2023), lego bricks, 383 x 651 cm

Ai Weiwei, artiste majeur de la scène indépendante chinoise et personnage phare d’Art Basel Miami, est un artiste militant engagé pour les droits humains. Fils d’un poète contraint au travail forcé, il connaît une enfance difficile. Il a lui-même été arrêté par le régime chinois en 2011. Il a étudié à l’université de cinéma de Pékin. Provocant et iconoclaste, il s’est érigé en figure de l’opposition au pouvoir chinois. Dans les années 1980, il vit aux Etats-Unis où il rencontre la Beat Generation à travers Allen Ginsberg ou le Ready Made par Marcel Duchamp, des personnalités qu’il admire et qui influenceront son travail. 

 

A la fois sculpteur, photographe, cinéaste, architecte… Ai Weiwei est un artiste protéiforme parvenant, à travers chacun des médias utilisés, à dépeindre la dichotomie de son pays d’origine, entre culture traditionnelle et contradictions de la modernité.  

 

Pour Art Basel Miami, la galerie berlinoise Neugerriemschneider a inauguré l’exposition d’une œuvre monumentale d'Ai Weiwei, Washington Crossing the Delaware (2023), entièrement composée de petits Legos. Une fresque dont la composition évoque celle des pixels d’une image virtuelle, mais questionne surtout la frontière entre ce qu’est "l’Art", et l’art accessible. L’usage de ce jouet issu de la société consumériste contraste avec la reproduction d’une toile historique et glorieuse. De plus, la réplique n’est pas parfaite : Ai Weiwei a représenté le Stade national de Pékin près de Washington afin de représenter les relations entre la Chine et les Etats-Unis. 

 

En témoigne la foule brandissant son smartphone face à l'œuvre aux legos, Ai Weiwei semble avoir à nouveau su attirer l’attention du monde de l’art en quête de nouveauté et de viralité.

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Cover © Proyectos Monclova at Art Basel Miami Beach 2023, Courtesy of Art Basel