Meet your artist : Claudia Bemposta

Publié le 21 Sep 2022

Rencontre avec Claudia Bemposta, une artiste qui met en lumière la force des femmes

Claudia Bemposta est une artiste franco-portugaise. Après des études en sociologie et des recherches liées aux violences de genre, Claudia associe sa première passion, la peinture, à son travail de recherche sur la représentation collective du genre.

Entre femmes fortes, corps sexualisés et univers naïf, Claudia Bemposta s’engage pour la réappropriation du corps des femmes et redessine un imaginaire collectif empreint du "female gaze".

Découvrez l’univers de Claudia Bemposta, une artiste franco-portugaise engagée dans la déconstruction de la représentation féminine ! 

 

Comment es-tu arrivée à la peinture ?

Je suis Claudia Bemposta, j'ai 30 ans. J'ai fait une licence en droit sciences po puis une année sabbatique durant laquelle j'ai un peu voyagé. Je suis revenue en France, et j'ai fait de la socio, en recherche. J'ai vraiment voulu travailler sur l'image. Je voulais trouver un terrain qui permette de travailler le genre, les violences de genre. Donc je suis partie en Colombie, pays qui réunissait toutes les problématiques que je voulais étudier sur les images qui étaient produites dans un contexte de violence. 

À ce moment-là, je me suis demandée si je n’avais pas raté ma vocation, car le travail sur l’image prenait de plus en plus de place. J'ai décidé en rentrant en France de faire un an aux Beaux-Arts de Porto. Je suis d'origine portugaise. J'aime le Portugal, l'art portugais. Je voulais m’en rapprocher et depuis, je continue à travailler sur ces sujets et à peindre. 

Ce sont tes études sur le genre qui ont inspiré ton imagerie féminine ? 

Tout est parti de ma grand-mère. Elle nous a élevées et c'était ce qu'on appelle une femme violente. C'était la représentation que j'avais d'elle : costaud et barbare. Ça m'a toujours un peu travaillée et en socio, j'avais étudié l'imagerie collective qu'on a des violences faites aux femmes. C'est souvent en noir et blanc, avec des femmes tapies dans un coin, frêles… 

Je voulais prendre un contre-pied et présenter des femmes dans leur quotidien, des femmes perçues comme violentes. Parfois, il suffit de voir un vagin, des seins ou quelque chose comme ça, pour que ce soit très sexualisé ou violent, bien que pour moi ça ne l’est pas. Je comprends toutefois, car je peins des femmes avec beaucoup de force, des muscles, donc peut-être aussi qu’il y a une forme de violence par-là. 

Comment qualifierais-tu ton art ?

 J'aime bien me dire que c'est un peu naïf, enfantin, et en même temps assez violent. Il y a  des couleurs douces, le rose, le vert… et en même temps des positions ou des images qui sont un peu plus fortes pour contraster. Par exemple, j’ai une toile inspirée d’une femme dans le métro, jambes écartées avec son sac de pommes. Ça me faisait penser à Adam et Ève mais en plus contemporain. En voyant sa posture très dominante, j’ai pris une photo en me disant que ça ferait un joli tableau.

Y a-t-il une œuvre d’art qui t’a particulièrement marquée ? 

Il y a une œuvre de Henri Rousseau, La guerre. C'est de l'art naïf, c'est beau, mais surtout, c'est une Amazone avec des corps d'hommes dénudés sous ses pieds. Elle est à cheval avec une arme à la main. Le fait qu'elle porte l'arme n’est pas commun. En sociologie, quand on étudie justement la violence féminine, on voit bien que l'arme a souvent été retirée des mains des femmes parce qu’elles en sont considérées comme incapables. Ça me parle, le fait qu’il représente la guerre via une femme qui porte l’arme de manière triomphale. 

Peut-on dire que ton art est féministe ? 

Au début, je me disais que c'était féministe. Maintenant je sors de ce terme, car c’est éminemment féministe. Quand on est peintre, femme, l’inverse serait ridicule, pas plausible. Ce sera toujours présent dans mes œuvres car je suis un être humain, social, construit.

Aujourd’hui, je considère que mon travail est plus intime, autobiographique. C’est souvent mon corps, car je le vois tous les jours. Et ces temps-ci je me pose une question, car je peins beaucoup de femmes nues. Il y a un ras-le-bol en art, alors je me demandais si je ne devais pas les habiller. Mais pendant des siècles, le corps féminin a été peint par des hommes et je trouve que c'est important aussi que les femmes se réapproprient leurs corps notamment par la peinture. C'est pour ça que j'aime travailler des corps musclés, sexualisés à outrance. C'est tout un travail que que j'ai envie de faire parce que je sais qu'on a vu beaucoup de femmes nues, mais sous le regard masculin, et pas féminin.