Meet Your Artist : interview avec l’artiste pop art Benny Arte

Publié le 25 Oct 2023

Rencontre avec Benny Arty, un artiste vénézuélien de pop art

Originaire du Vénézuela et établi à Paris, Benny Arte, de son vrai nom Jonathan Becerra, découvre la peinture dès son plus jeune âge auprès de son père. Il opte néanmoins pour des études d’informatique, avant d’être rattrapé par sa fibre artistique. Passionné par la culture pop, geek et manga, c’est tout naturellement qu’il opte pour le pop art pour s’exprimer. 

 

A travers ses œuvres pop art, Benny Arte fait revivre les personnages de BD mythiques de notre enfance pour rendre hommage aux grands artistes d’hier tout en émettant une critique subtile de la société d’aujourd’hui. 

 

Grâce à son imagination débordante, Benny Arte fait voyager ces êtres de fiction des années 1960 à 90 dans l’espace et le temps. Son univers pictural est un multivers : le champ des possibles infini. Ainsi, Mickey, Snoopy, Donald ou Rondoudou peuvent se croiser, surfer la grande vague d’Hokusai ou rencontrer la Petite Fille au ballon de Banksy

 

Toutefois, l’esthétique gaie, abondante et colorée de Benny Arte véhicule toujours un message. Du coût de la vie aux bavures policières en passant par la surconsommation, les sujets qui bousculent notre quotidien trouvent écho dans ses toiles, et se laissent déchiffrer par qui acceptera d’être aussi bien spectateur que lecteur actif des histoires que l’artiste tisse d’une oeuvre à l’autre.  

 

A la fois numériques et physiques, les créations de Benny Arte mêlent retouche logicielle et intervention manuelle. Le dialogue entre virtuel et physique permet à l’artiste d’approfondir son esthétique et de jouer avec la matière pour un résultat toujours plus percutant et interactif. 

 

Découvrez sans plus attendre le portrait passionnant de Benny Arte et explorez ses œuvres dans sa galerie en ligne

Qu’est-ce qui t’a mis sur la voie de l’art ?

Jonathan Becerra, alias Benny Arte. Je suis né à Caracas. J'ai 52 ans. Je suis davantage formé pour réparer de grands réseaux de PME que pour la peinture ou la création artistique. La peinture est entrée dans ma vie car j'avais une imagination débordante, et que je voulais prendre part à l'univers que j'aime. Cela s'est fait petit à petit, en créant des mises en scènes avec des personnages que j’appréciais. Il s’agit de tout ce qui concerne la culture pop, la culture geek, le manga... ce genre de choses.

 

Tu n’as donc pas suivi de formation artistique ?

 
Je ne suis pas allé en école d'art car je suis vite tombé dans la marmite, mon père étant artiste professionnel. Il crée de l'Op Art, du Land Art, et d'autres types d’installations. Il représente le Venezuela et est bien connu dans son milieu artistique, en particulier en Amérique latine et aux États-Unis. 

 

Petit, j'accompagnais mon père partout. Je pense que mon souvenir le plus marquant est à l'âge de six ans. Il m'emmenait dans des musées au Venezuela : Teresa Carreño, El Museo de Bellas Artes... Et il y avait des ateliers pour les enfants. Les enfants étaient réunis dans une salle et nous peignions. En fait, ce sont mes tous premiers souvenirs artistiques. Les grandes fresques réalisées par plusieurs mains d'enfants. 

 

Pourquoi n’as-tu pas choisi de suivre les traces de ton père ?


Honnêtement, lorsque vous êtes l'enfant d'un artiste, vous ne voulez pas suivre les traces de votre père. Mon père est un artiste... Son père était un militaire. Donc vous voyez, c'était aussi une rébellion contre son père. Moi aussi, de mon côté, j'ai dit que je n'aimais pas l'art, donc je suis devenu ingénieur en informatique, rien à voir avec l'art ! Mais après un certain temps, ça vous rattrape.

 

D’où vient le pseudo de Benny Arte ?

 
C'est aussi la raison pour laquelle j'ai pris le nom de Benny Arte, pour que nous ne sachions pas que je suis le fils de Milton Becerra, ou le frère de Hamilton, qui est également dans le monde de l'art. Le nom de Benny Arte vient d'un personnage Lego, un petit astronaute bleu. C'est avec ce personnage que tout a commencé. En prenant des photos, des Legos... Je créais des décors pour lui. J'ai donc gardé son nom et ajouté "arte" pour dire que c'est Benny qui fait de l'art.

 

Qu’est-ce qui te plaît dans le pop art ?


J'ai commencé par mettre en scène Snoopy, et à partir de là, à créer des scènes où il est soit révolté par ce qui se passe, soit j'emprunte beaucoup à Banksy, ainsi qu'à d'autres artistes. Je trouve que le pop art vous permet de vous exprimer, de transmettre des messages, même subtils. Mais j'évite tout ce qui est religieux. C'est très délicat. Je préfère parler des événements du quotidiens, comme l'augmentation des prix, par exemple. Dans certaines images, je mets en lumière notre surconsommation, ou le fait que nous sommes toujours devant un écran, que nous n'apprécions pas ou ne regardons pas notre environnement.

 

Pour toi, le pop art a donc une portée critique ? 

 

Comme vous pouvez le voir, il y a toujours un message. Et c’est vrai qu'il y a un angle positif. C'est au spectateur de le voir. Vous pouvez ne voir qu’un Picsou sur la toile, ou vous pouvez identifier plusieurs messages cachés. Par exemple, qu'il vaut mieux aimer autrui que courir après l'argent. 

 

D’où viennent les références pop que tu utilises dans tes toiles ? 

 

Le Venezuela, comme vous le savez, est en Amérique du Sud, donc très proche des États-Unis. Nous avons une culture assez américaine. J'ai grandi avec toutes ces séries télévisées des années 60. Zorro, Le Surfer d’argent... Il y avait une innocence dans ce type de dessin animé que j’aimais beaucoup. Et je voulais faire quelque chose pour revivre cela.

 

Où puises-tu l’inspiration ? 

A l’époque, le dimanche, nous allions acheter le journal, nous y courions même, car il y avait trois ou quatre pages dédiées aux bandes dessinées. Je voulais recréer cette logique dans mon travail : intéresser les gens avec une histoire... comme une sorte de scénario. Quand je veux créer quelque chose, je vais sur Internet, j'explore ce qui se passe dans le monde jusqu'à ce que je tombe sur une image.

 

Quels sont tes sujets de prédilection ?


J'évite tout ce qui est difficile. J'essaie de faire des images plutôt apaisantes. Donc je tombe sur une image et à partir de là, je commence à travailler sur le personnage. Je me dis : "Oh, Snoopy irait bien dans cet univers..." Il se promène, regarde les choses, ou bien il passe simplement en voiture. 

 

Ton univers pictural est donc une sorte de multivers ? 

 

Il y a des peintures qui communiquent entre elles. Certains collectionneurs l'ont vu et m’ont dit : “J'ai remarqué que tu as mis ceci ici, puis tu as fait une suite ici…” Le concept de multivers est très ancien. Marvel l'a mis en avant avec Captain America, et ainsi de suite. En fait, cela leur permet de créer une infinité de personnages. C’est pareil de mon côté, mais avec des univers. Cela signifie que Snoopy peut se retrouver dans un paysage de Hokusai. C'est pourquoi vous pouvez parfois voir la grande vague dans mon travail. Ainsi, Snoopy peut voyager dans le temps, comme un explorateur, et montrer au monde que de grandes choses ont été faites dans le passé aussi, que nous ne devons pas oublier ces grands artistes. Donc, en même temps, je peux leur rendre hommage.

 

Qui sont les artistes qui t’ont marqué ?

 
Parmi les artistes qui m'ont frappé, il y a Rockwell. J'aime aussi beaucoup Banksy. Et Hokusai, son style, la pureté de l'image. Mon père aussi, que je respecte. Je ne devrais pas le dire, mais j'aime ce qu'il fait. 

 

La maison de Ben m'a vraiment impressionné. C’était au Centre Pompidou, je ne l’oublierai jamais. Je n’étais qu’un enfant, mais je me demandais comment nous pouvions mettre cette maison extraordinaire dans le Centre. 

 

Il y a Carlos Cruz-Diez. un artiste vénézuélien que j'aime beaucoup. Jesús Rafael Soto aussi. Je suis imprégné de mes références culturelles. Récemment, j'ai fait référence à Tío Rico. Tío Rico est la traduction espagnole de “oncle riche", comme Oncle Picsou. Sauf que pour nous, Tio Rico est une marque de glace. Ainsi, toute personne venant du Venezuela saura à quoi je fais référence, mais quelqu'un d'autre ne comprendra pas vraiment. Alors parfois, je m'amuse à ramener un peu du pays, pour montrer que je n'oublie pas mes origines, et que j'y tiens.

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